Requiem pour un poisson rouge XLI

– Puisque nous sommes tous réunis comme pour l’enterrement de la mama, j’ai le droit de résumer l’affaire.

– Ta gueule!

– Laissez- le parler. On va voir si le grand Maître du barreau a vraiment tout découvert.

– Tout peut- être pas, mais à 99%. Il existait un couple qui vivait grand train, sauf que le train dispendieux n’était plus en adéquation avec les rentrées de pognon. Le jeu, quelques placements foireux, les gonzesses, désolé madame. Bref le tableau habituel du désargenté flamboyant.

Et avec le temps la situation ne s’est pas améliorée, lors de mes pérégrinations j’ai découvert que le magnifique hôtel particulier de Monseigneur est hypothéqué, vivre sur le dos des banques je conteste pas l’idée, sauf que le prêteur de talbins au bout du moment il réclame. Du coup a germé cette idée géniale mais vieille comme l’immonde, l’arnaque à l’assurance- vie. Un grand classique, ça peut marcher avec du bol.

– Nous sommes perdus, à cause de toi!

– Tais- toi idiote.

– Attendez, c’est le début du film. Jusque là tout se passe pour le mieux, Mme passe l’arme à gauche avec la complicité d’un cancer bienvenu et d’un médecin ayant de grosses dettes de jeu qui ont été effacées d’un coup. Brave médecin qui accorde un permis d’inhumer dont il sera le bénéficiaire, s’il avait su!

– Il voulait nous doubler, nous balancer à l’assurance.

– La flèche est virée sur le compte du bénéficiaire, votre fils, il suffisait ensuite comme il est spécial de le mettre sous tutelle pour récupérer l’oseille et l’affaire est dans le sac.

– Jusque là grand classique. Comme dans tout bon plan, il y a le grain de sable, chez- vous c’est une plage entière. Premier ou dernier peut- importe l’ordre, il a fallu buter le toubib véreux, d’où l’entrée en lice de Paulo et son pote l’élégant.

– Ta gueule!

– Aujourd’hui t’as un vocabulaire varié, l’enflure.

– Je vais te défoncer ta gueule!

– Calmez- vous, laissez le terminer, j’adore les romans.

– Grosse connerie avec le docteur Maboule, l’incinération est à la mode pourtant, pour être correct j’avais pas pensé à ça jusque récemment. A trop vouloir bien faire, un gentil enterrement, dans un gentil village familial. Qui aurait pu penser qu’un jour quelqu’un irait ouvrir le cercueil.

Je vis les mines déconfites de mes deux escrocs de bas- vol.

– C’était vous, la profanation?

– Il arrive parfois que le destin joue des tours pendables. Madame, si ça peut vous rassurer vous n’êtes pas dans le caveau, ah, autre chose, la juge d’instruction a ordonné l’exhumation.

– Horreur, partons, nous sommes foutus.

– Tais- toi, il bluffe.

– Un mort, le premier de la série. Deuxième grain de sable, votre fils, un peu particulier je l’avoue, avec des parents tordus, difficile d’avoir des enfants droits, nous verrons plus tard.

Paulo et son pote ne travaillent pas gratos, depuis le temps je le sais, pas vrai?

– Ta gueule!

– Vous vous êtes dit, les diams, on peut aussi faire le coup de l’assurance. Un petit vol, et hop ! Tout le monde se partage le blé et on garde la quincaillerie. Sauf que le vol, grain de sable à nouveau, c’est votre fils qui le commet… J’ai pas la réponse au pourquoi…

– Il réprouvait notre liaison, il a voulu se venger.

– Alerte générale, il faut récupérer le magot et va savoir si le fiston va pas monnayer. Passionnante, l’histoire, vous auriez dû en faire un roman, vous auriez gagné du pognon. Le complice de Paulo se dit que peut- être il pourrait se mettre à son compte et se rend chez votre fils dans le pavillon, au vrai n°6, pas l’autre, votre lieu à galipettes espagnoles, cher Baron. Oui je me suis renseigné vous être proprio de deux baraques dans cette rue, la piole pour les fantaisies et celle de Gérald. Un clou a foutu la merde. Faudrait faire une loi contre les clous.

– C’est quoi encore?

– Ne l’écoute pas.

– Vous prenant tous de vitesse, l’Elégant, parce- que c’est lui, j’ai reconnu son costard dans la penderie, file chez votre fils. Là c’est un peu flou, j’imagine la scène, il commence à le menacer, voit l’aquarium et décide de s’en prendre aux poissons histoire de le faire parler. Mauvais plan, le fiston déteste que l’on martyrise les animaux, y compris les poissons rouges, pris de rage il flingue l’Elégant et sa comparse. Paulo c’était qui la greluche?

– Une tapineuse qui lui a tourné la tête, c’est elle qui l’a embarqué dans cette combine.

– T’as raison, les gonzesses c’est toujours de leur faute. La suite vous connaissez, découpe à la scie, arrestation et grosse emmerde, le compte de votre fils est bloqué et vous ne pouvez plus accéder à la cagnotte, la grosse emmerde. Du coup on fait appel à qui? A l’avocat des causes désespérées. Rétrospectivement C’EST le premier gros grain de sable…

A votre place j’aurai fait pareil, j’ai toujours pensé que j’étais le meilleur. Madame n’a pas l’air convaincue?

– Je te l’avais dit que ton idée était conne, voilà où nous en sommes.

– Tais- toi!

– Ben oui, depuis le début je sentais la foirade, surtout avec la dégaine du faux M Prouvost et comme par hasard le retour de Paulo l’emmanché. Là où je suis déçu c’est que vous m’avez pris pour un mongolito, avec mon expérience je sens les coups venir.

– Belle démonstration cher Maître mais vous n’êtes pas en situation de force.

– Exact!

– Nous aimerions en savoir plus sur certains points.

– Cher Baron de mes fesses vous avez repris de l’assurance! En effet j’ai oublié un détail important, la caillasse, la bimbeloterie, tout ce qui a valu ce bordel, comme toujours dans ces crapuleries, c’est la petite combine de trop qui fait tomber les cloches.

Comme toutes les planques la meilleure est celle visible de tout le monde, ce putain d’aquarium. Ahahahaha! C’est vraiment con , tout le monde est passé devant, personne n’a percuté, peut- être l’Elegant, va savoir!

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