Requiem pour un poisson rouge XVII

– Comme on l’a évoqué, j’ai bien vécu, sauf qu’à la réflexion et je m’en rends compte maintenant j’ai délaissé l’éducation de mes enfants.

– Vous en avez combien?

– Cinq, un avec chaque femme, quatre filles et un fils.

– Je sais encore faire les soustractions, bon vos filles se cament, se prostituent et votre fils deale et fait des casses.

– Pour mon fils vous n’en êtes pas loin…

– C’était pas trop compliqué, en résumé il est enchristé et va falloir que je m’occupe du dossier, décidément c’est la période fête des pères.

– Je ne comprends pas!

– Y a rien à comprendre.

– En fait, il n’est pas en prison, il a disparu…

– Je viens faire quoi dans l’histoire, suis pas les objets trouvés non plus.

– Arrêtez avec votre ironie, ce n’est pas drôle, vous semblez l’ignorer mais ma dernière épouse est la seule avec qui je n’ai pas divorcé.

– Vous êtes convenu d’un commun accord de vivre chacun de votre côté?

– Non, elle est décédée d’un cancer.

– Encore!

– Comment encore?

– Là- aussi vous ne pouvez comprendre.

Faut avouer, c’est la loi des séries! Je vais pas me taper tous les veufs avec fils délinquant de la création!

– Résumons, votre fils s’est tiré et vous le recherchez, il est majeur?

– Oui, 22 ans.

– On revient toujours au point de départ, vous attendez quoi de mon côté?

– Mon fils a disparu, en fait comme vous l’avez indiqué tout à l’heure, j’étais à la commission des armées au Sénat, ceci m’a permis d’avoir des contacts avec les services spéciaux, il m’a été dit qu’il se serait converti à l’islam et parti faire le djihad.

– Vous en avez parlé à la police?

– Non, pour l’instant ce sont des hypothèses non confirmées.

– Je vois, toujours pas mon rôle, je vais pas aller en Syrie ou ailleurs le chercher.

– Il me faut un homme de confiance pour gérer ce problème.

– Vous voulez une assistance juridique.

– En quelque sorte.

– C’est pas gratuit.

– Votre prix sera le mien.

– Comme j’aime entendre cette mélodie… Revenons à votre fils, qu’est- ce qui vous fait penser qu’il a mal tourné?

– Il a eu une adolescence difficile, ça a commencé par des joints, je l’avoue j’ai été trop laxiste à l’époque, c’est surtout après le décès de sa mère qu’il a vraiment basculé, il découchait, je me suis rendu compte qu’il avait volé de l’argent, je laisse des espèces pour que le personnel puisse faire des achats, or à plusieurs reprises des enveloppes ont disparu. Vous vous rendez compte que j’ai accusé à tort mes employés. En plus je lui donnais de quoi largement subvenir à ses besoins.

– C’était pas illogique.

– Au départ, sauf que j’ai ensuite découvert la disparition des bijoux de ma femme, des diamants, émeraudes de grande valeur, nous n’étions que lui et moi à savoir où ils se trouvaient.

– Ok, pour acheter du H c’est peut- être pas ce qu’il y a de mieux par contre en effet, les diams c’est bon pour le troc de guerre. Pour acheter des armes, des munitions, des faux papiers, des complicités, c’est pas con. Si c’est vraiment ça, c’est du lourd.

– Vous voulez vous en occuper?

– Du moment que ça paie, surtout que pour l’instant y a rien à faire.

– Dites-moi vos honoraires.

– Il commence à se faire tard et ne gâchons pas cette magnifique soirée avec des trivialités. Juste pour compléter mes infos, votre dernière épouse est décédée à quel âge?

– 44 ans, elle avait 22 ans quand nous avons eu Maxime.

– Vous êtes resté longtemps avec elle par rapport aux précédentes.

– j’avais trouvé mon équilibre avec elle, c’était une femme parfaite.

– C’est elle sur les photos, sur le meuble?

– Non, ce sont mes filles.

– Je ne vais pas vous importuner plus, l’heure tourne.

– Au contraire, je suis content de vous avoir revu. Je vous ressers ma fine Champagne.

– C’est pas de refus, vous êtes un esthète en matière d’alcool.

– Pour changer un peu, parlons de vous, vos affaires?

– Comme tout le monde ça va, ça vient.

– J’ai vu que êtes l’avocat du tueur à la malle.

– Les nouvelles vont vite!

– C’est dans la presse.

– En effet!

– Il est innocent pour vous? Tout semble l’accabler pourtant, dossier périlleux, je suis curieux de voir comment vous allez vous en sortir!

– Je l’avoue, moi aussi.

– Il ne vous a rien dit? Vous devez en savoir plus.

– A part que la bouffe de la prison est dégueu… Dites moi, vous seriez pas en train de me tirer les vers du nez?

– Toutes mes excuses, c’est le vieux réflexe du patron de presse, ah si j’étais encore en activité on en aurait des titres sur ce crime!

– Oui, j’en doute pas, 10% de vrai, 90% de bidon, c’était votre marque de fabrique.

– Hahaha, ça vendait et plaisait au public, regardez les journaux actuels, c’est du verbiage sans intérêt, il n’y a plus de reporters, ils attendent tous la dépêche d’agence ou le communiqué du ministère.

– O tempora O mores! Bah! Qui achète la presse aujourd’hui?

– Vous avez raison, plus personne, c’est pour ça que j’ai vendu mes titres.

– Bonne initiative, ça a du vous rapporter un max.

– Non, j’ai juste effacé les dettes.

– Qui paie ses dettes s’enrichit.

– Hahaha! Toujours votre ironie mordante.

Sur ces bonnes paroles je levais le camp. La tocante avait tourné, je dis pas que j’aurai fait un sort à la fine mais la semaine n’était pas terminée.

Après avoir rendu mes civilités au Baron, je repris ma caisse, qui il faut le dire, bien dressée connaissait le chemin du paddock, j’étais je l’avoue un peu au radar.

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