LES REVES DE NICOLAS HULOT (II)

CHAPITRE II :  LA VOITURE ELECTRIQUE, UNE ABERRATION

Données de base

La consultation d’internet  sur ce sujet est frustrante, car polluée par le désir manifeste de convaincre le public que la voiture électrique serait une solution de remplacement à l’automobile actuelle. Nous allons voir qu’il n’en est rien, et qu’il n’en sera probablement jamais rien. Déjà le principe est illogique : les carburants des autos actuelles sont des dérivés quasi-directs du pétrole brut, et alimentent des moteurs avec un intermédiaire   négligeable,  entre le pétrole brut extrait tel que de ses puits naturels, et le moteur à explosion. D’ailleurs un moteur à explosion nécessite très peu d’aménagements pour consommer du gaz naturel au lieu de fuel ou  d’essence. A contrario, l’électricité n’existe pas dans la nature, il faut la produire par des processus évolués,  soit centrales nucléaires, soit éoliennes, soit panneaux solaires, soit centrales thermiques dont le  rendement dépasse péniblement 50 %.  Donc la voiture électrique introduit un intermédiaire de plus, toujours sophistiqué, entre énergie primaire et alimentation des moteurs. Cet intermédiaire  est nécessairement extérieur à elle, comme nous l’avons expliqué à la fin   des rappels, et c’est cela qui est illogique.

On trompe le public en lui présentant la voiture électrique comme offrant des rendements bien plus performants que la voiture à moteur à explosion.  C’est là, en effet, faire l’impasse sur la production d’électricité nécessaire aux moteurs électriques.

Voyons la réalité de plus  près.

Prenons d’abord une Mégane Renault diesel de 2012 du milieu de gamme. Moteur diesel de 1500 cm3 consommant en moyenne moins de 4,5 l aux 100 km,  développant une puissance de 81 kW  pour un véhicule  pesant 1215 kg. Le réservoir de fuel contient 50 litres, donc offre une autonomie totale de sensiblement plus de 1000 km (on pourrait les parcourir sans s’arrêter).  Ces 1000 km coûteront environ 60 euros de fuel.  Les 1215 kg assurent une protection non  négligeable en cas d’accident. Quatre  personnes peuvent y voyager dans des conditions  plus que correctes, avec des bagages  significatifs, sur tous types de routes et par tous les temps sauf peut-être par  temps de neige, de nuit comme de jour, avec chauffage s’il fait froid et climatisation s’il fait chaud.  Elle permettra de voyager hors de France, dans des pays au réseau routier plus difficile que le nôtre  et moins électrifiés, ou même pas électrifiés du tout.

Elle coûtera à l’achat, neuve,  moins de 20 000 euros.  Bien entretenue, elle parcourra sans problème majeur 300 000 km, et après ce kilométrage, pourra recevoir un moteur échange standard pour une somme de moins de 2000 euros.  Avec du soin, on pourra ainsi la garder au minimum quinze ans.

Essayons d’obtenir des avantages comparables avec une voiture électrique. Inutile d’en espérer tant, car pour disposer de 81 kW de puissance (110 CV), on tombe dans des véhicules électriques très haut de gamme, du type Tesla, dont le prix d’achat dépasse allègrement 75 000 euros.

Contentons-nous  donc d’une puissance  de 45 kW (62 CV). Elle exigera une batterie (nécessairement construite en en assemblant un grand nombre montées en série) pouvant délivrer 400 ampères  sous 250 volts, donc où seront stockés 100 KWh. En conduite normale sur route ordinaire avec montées, descentes, virages, ralentissements et remontées en vitesse etc, elle délivrera en moyenne 200 ampères sous 250 volts, donc  consommera 50 kWh à l’heure. Donc, bien chargée au départ, elle sera complètement déchargée au bout de deux heures.  Quels que soient les gadgets imaginés pour recharger, vous ne pourrez jamais recharger en moins de 30 ou 40 minutes, et encore, seulement si votre auto est équipée d’options coûteuses, et si de plus vous trouvez des bornes de recharge compatibles avec ces options ; sinon, comptez au moins 4 heures.

Attention ! s’il fait froid, votre chauffage va beaucoup consommer, comptez une heure et demie d’autonomie grand maximum. Et s’il fait chaud, même topo (climatisation, encore plus coûteuse que le chauffage).   Si vous conduisez de nuit, vos éclairages vont  aussi consommer du courant, l’alternateur de votre moteur prélèvera une partie de ce que donne votre batterie.  Votre  auto sera forcément moins lourde que la Mégane ci-dessus, vu la moindre puissance.  Les 100 kWh de votre batterie,  qui vous auront permis de conduire au maximum deux heures, vous auront coûté, au prix actuel du kWh domestique (0,15 ct le kWh), une quinzaine d’euros. Si vous voulez parcourir 1000 km, il faudra recharger au moins 5 fois et être parti à pleine charge, donc cela vous coûtera six charges complètes, donc 90 euros, en admettant que vous puissiez parcourir vos 1000 km en  12 heures.

Petit détail : pour un véhicule électrique de cette classe (45 kW, c’est  du haut de gamme en ce domaine), la batterie coûte en ce moment dans les 250 euros le kWh stocké, donc 25 000 euros. En rognant sur tous les autres équipements de l’auto, ça vous amènera  le coût d’achet du véhicule, au minimum,  aux environs  de 40 000 euros. Votre batterie tiendra le coup 1000 cycles charge/décharge grand maximum, donc 1000 fois 200 km, donc 200 000 km. Cette estimation est bien sûr très optimiste. Attendez-vous plutôt à la moitié ;  l’ennui c’est qu’un changement de batterie coûtera 25 000 euros….

Autre détail : pour des raisons qui seront  exposées plus loin, n’espérez pas que le courant pour recharger votre batterie vous sera vendu au prix du courant domestique. Des taxations ad hoc interviendront vite, une fois piégés suffisamment de clients de voitures électriques pour avoir justifié des dépenses importantes d’équipements de  recharge des batteries.  Les constructeurs n’auront  aucun intérêt  à ce que vous rechargiez tranquillement vos  batteries chez vous, alors qu’ils auront investi dans ces coûteuses stations de recharge. Pour vous empêcher de les court-circuiter, ils vont simplement concevoir des bornes de rechargement spéciales dont ils équiperont vos batteries, de façon qu’il vous soit impossible de trouver les prises de rechargement  qu’il faudrait.

N’allons pas plus loin :  tous les sites consacrés à la voiture électrique omettent savamment de procéder aux comparaisons ci-dessus. Par exemple, quand ils parlent d’autonomie, ils donnent systématiquement des estimations en kilomètres parcourus, (sur autoroute dégagé, par temps sec, à vitesse constante, dans des conditions idéales, ce qu’ils oublient de préciser), mais jamais des estimations en temps de voyage pour un kilométrage déterminé, sur un parcours routier lambda bien déterminé. Ils auraient trop peur que vous compariez vos voyages en Mégane de 1000 km en douze ou  treize heures tout compris, avec les quelque vingt ou  vingt-quatre heures qu’il vous faudra en voiture électrique, si tout va bien et si vous avez trouvé de bonnes stations de recharge, où vous n’avez jamais dû  faire la queue. Les sites en question vous feront miroiter  des prix de recharge ridicules, en omettent de vous expliquer  que c’est pour un temps d’utilisation d’une heure avec une auto électrique de ville de 400 kg et de  20 kW de puissance où vous serez seul, sans pouvoir  y transporter grand’chose, et  où vous risquerez des surprises s’il faut vous chauffer ou vous climatiser, surtout par temps  froid, car coincé dans un embouteillage en plein hiver, dans votre  auto électrique, il faudra bien vous  chauffer, et c’est là que vous  penserez aux publicités qui vous assuraient  que les temps d’attente dans les encombrements ne consomment pas d’électricité……

On l’a compris : la voiture électrique n’est pas le miracle auquel on veut nous faire croire. Même en améliorant sa technologie, elle coûtera toujours nettement plus cher que l’auto actuelle pour bien moins de services rendus, tant à l’achat qu’en dépenses de courant  pour la faire rouler. La vérité est cruelle mais incontournable :

Si on renonçait au remplacement de l’auto diesel par l’auto électrique de puissance au moins égale,  le passage à l’auto électrique impliquerait nécessairement une régression brutale   du confort, des services rendus par l’auto,  et de la liberté de se déplacer.

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